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26 septembre 2013 4 26 /09 /septembre /2013 03:07

calibres 12

 

 

 

Résumé : 11 h 30 rendez-vous pour boire un coup au café des arts, cela vous tente ?


Le commissaire et l'inspecteur arrivèrent à 11 h 30 précises, confirmation faite par le coup de cloche de Saint-Médard et trois secondes plus tard par celui de Saint-Laon, deux églises voisines à Thouars qui se font concurrence depuis toujours. Mais comme Saint-Médard a une tête d'avance (c'est ici que sont célébrées les obsèques, autant dire qu'on y va souvent), elle sonne un poil avant. Où vont se nicher les petites mesquineries, fussent-elles catholiques ?

Jérôme de la Ravinière portait beau. De stature fine, même un peu maigre, il portait sur le visage les stigmates d'une fin de race, la lippe un peu pendante , un léger strabisme, et des dents en mauvais état. Il parlait « rupin » comme on dit au bar des cheminots.

_ Jouons franc jeu voulez-vous Monsieur Balthazar Forcalquier. J'ai consulté votre longue fiche des RG ( Renseignements Généraux) je sais à peu près tout de vous.

_ Ah oui ? Et qu'est-ce que je bois d'habitude ?

_ Heu... Laissez moi me souvenir. J'ignore ce que c'est... mais c'est du Duhomard.

_ Ah Sophie, tu as entendu m'sieur le commissaire paie sa tournée de Duhomard gueula Balthazar dans cet estaminet gracieux aux boiseries polies par plus d'un siècle et demi de lassitude alcoolisée.

Le commissaire amusé sourit et découvrit une rangée de dents pourries. Bizarrement il n'avait pas mauvaise haleine. Plus tard Balthazar éclaircit ce mystère : le commissaire suçait des pastilles de menthe forte.

_ Donc voici ce que je vous propose. L'affaire est grave, votre article en témoigne. Accordons-nous. Faisons... comment dire... partie commune. Je vous donne des informations directement ou bien par le biais de l'inspecteur Legrandu. Je crois d'ailleurs qu'il a commencé cette besogne sans mon accord, mais c'est déjà oublié. En échange vous me faites profiter de vos connaissances dans le milieu anarchiste.

_ Cher monsieur, vous avez peut-être de bonnes manières mais vous salissez la moquette. Vous laissez des miettes. Je ne mange pas de ce pain. Les flics chez eux, les journaleux ailleurs, c'est ma loi. Il ne peut pas y avoir d'autre accord. Vous me dites ce que vous voulez bien, et moi pareil. On peut négocier sur cette base. Mais pas plus, sinon il y a toujours un gogo et je m'en voudrais que ce fut vous. Comme dit Sun Tzu : « Tout l'art de la guerre est basée sur la duperie." 

_ Sun Tzu, général chinois, VI e siècle avec JC.

_ Vous avez gagné le super banco, et c'est moi qui paie la deuxième tournée.

_ Seconde tournée cher Balthazar, seconde, si vous me permettez cette familiarité car, il n'y en aura pas de troisième. Je dois me tenir, en dépit des attraits de ce Duhomard, ma foi fort savoureux.

Il est « prout-prout », un poil pédant et coincé du cul, mais on en fera quelque chose pensa Balthazar en trinquant : « marché conclu et cochon qui s'en dédit ! »

_ Ce sera comme vous dites. « Tout chrétien sans héroïsme est un porc », Léon Bloy.

Il cite Léon Bloy pensa Balthazar, nous ne serons jamais amis, tout au plus liés.

 

_ En signe de bonne volonté voici ce qu'affirme le médecin légiste et les experts de la police scientifique, dit le commissaire, vous allez voir c'est intéressant.

A SUIVRE...

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25 septembre 2013 3 25 /09 /septembre /2013 03:10

calibres 11

 

 

 

 

Résumé : Le tireur qui a flingué Michel Crapute signe « Carlota Machete » et rend ainsi hommage à une esclave insurgée. Voilà qui change la donne et sort Thouars de sa torpeur. La presse nationale et même anarchiste ne va pas tarder à débouler.

_ Monsieur Forcalquier ? Ici le commissaire, Jérôme de la Ravinière. Je vous l'ai dit je n'aime pas ceux de votre espèce. Comme vous j'ai lu Les Illusions Perdues de Balzac et j'ai appris ce qu'était un canard : une nouvelle fausse qui devient crédible parce qu'elle est publiée. Donc les journalistes... Je m'en méfie comme de la peste bubonique. Mais vous m'avez épaté ce matin, il me faut vous l'avouer. Mon honneur m'impose une amende honorable. Nous cherchions en vain qui était cette Carlota Machete, vous nous apportez la réponse sur un plateau. Je suis fair-play, mais brisons là, je préfère la langue de Molière, je suis beau joueur. Prenons un verre ensemble et nous deviserons, voulez-vous ?

_ Certes, certes. Disons 11 h 30 au café des arts, répondit Balthazar aussi souple qu'un chat maigre quand il s'agit de boire un coup à bon compte.

_ C'est bien noté je viendrai avec l'un de mes subordonnés, l'inspecteur Legrandu. Il m'a confié ce matin qu'il vous connaissait un peu et qu'en dépit de vos inclinations... disons gauchistes... vous étiez un homme d'un commerce agréable.

_ S'il le dit, ce flic ne saurait être tout à fait mauvais puisqu'il n'a pas d'enfant.

_ Vous êtes drôle Monsieur Forcalquier et vous connaissez les humoristes américains et notamment ce cher WC Fields.

Le chef des flics était loin d'être un con... Du jamais vu. Et cultivé en plus, ce qui chez les « Cognes » est une denrée rarissime. En raccrochant, il faut bien le dire Balthazar était bouchée bée, au point que Martine, la précieuse secrétaire, s'inquiéta :

 _ ça va Balthazar ? Tu veux un coup de blanc ?

 

A SUIVRE...


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24 septembre 2013 2 24 /09 /septembre /2013 03:58

 

 

calibres 10 1

 

 

 

Résumé : Une certaine Carlota Machete s'est mise en tête de flinguer des patrons. Bon, ce n'est pas légal, légal, mais détourner le fisc non plus, et c'est pourtant bien vu chez les patrons.



En lisant la rubrique de Thouars dans le Courrier de la République le lendemain, le lecteur avait tous les détails connus sur la mort de Michel Crapute. Plus une petite nécrologie fort ordinaire du défunt dans le genre : « homme discret, PDG de la RIGOMEX ( fabrique de ressorts ), membre du syndical patronal, décoré du mérite national, bla, bla, bla »

Et la touche balthazarienne : une note passionnante sur Carlota Machete, puisée à la meilleure source, celle du « Monde Libertaire » que nous publions ici in extenso :

« ce confrère bien documenté qui nous apprend dans son numéro 36 de son quinzomadaire, sous le titre Les Héroïnes de l'Abolition : en ce 10 mai, jour de commémoration de l'abolition de l'esclavage, lorsque nous entendons parler de personnages mythiques de la traite négrière ou des abolitions, il s'agit évidemment de héros noirs. Comme si la négresse ne s'était pas libérée de ses chaînes, comme si elle n'avait pas participé aux rebellions, ni aux soulèvements ! Niées de l'histoire, leur héroïsme a été passé sous silence, enterrées au profit de l'homme noir, afin que ces messieurs puissent retrouver leur virilité perdue à jamais sous la chicote journalière du maître esclavagiste. Leurs voix pourtant sont parvenues à nos oreilles, murmurant tout d'abord et finissant dans un cri strident : NE NOUS OUBLIEZ PAS !

« Comme Harriett Tubman, combattante de la liberté afro-américaine, dont la valeur marchande ayant baissé pour cause de maladie, qui s'est enfuie afin d'éviter d'être vendue à bas prix ! Une fois libre elle a pensé aux siens courageusement, sans faillir, faisant des aller-retour dans le Maryland en conduisant des esclaves vers la liberté : le Canada et les états du nord. Comme Queen Nanny, guerrière Ashanti née en 1686 au Ghana actuel et déportée en Jamaïque pour y être esclave, qui dirigea l'insurrection des Maroons ! En 1720, elle conquit un territoire stratégique, surnommé « Nanny Town » où les esclaves pouvaient vivre libres. Organisant des attaques bien coordonnées contre les plantations, elle libéra, en 30 ans, plus de mille esclaves dont elle s'occupa jusqu'à sa mort, laissant derrière elle une communauté de Maroons fière et libre.

« Comme Carlota Machete, leader de la rébellion des esclaves en 1843 à Matanza à Cuba. Guerrière d'origine Lukumi et Yoruba qui a combattu sans peur, à la machette, ses tortionnaires. Capturée, puis écartelée, sa voix résonne encore jusqu'à nous. Signé Élisabeth Claude ( émission femmes libres sur radio Libertaire).

« Voilà qui était Carlota Machete ! Une femme libre ! Une insurgée ! La fin de Michel Crapute est donc un acte politique ! »

 

Le téléphone sonna, c'était le commissaire.

A SUIVRE...

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23 septembre 2013 1 23 /09 /septembre /2013 03:22

calibres 9 copie

 

 

9

Résumé :  l'article n'est pas passé, la crapule de Crapute avait des appuis solides, mais avec une balle dans la tête ce sont ses propres jambes qui ont fléchi. 

Sur le marché de Thouars soudain vidé : on voit le corps de Crapute la tête plus lourde de quelques grammes de plomb et de cuivre, les flics, les pompiers, et le commissaire qui gueule :

Et virez moi ce journaliste de la scène de crime!

L'inspecteur Legrandu s'approcha et murmura à l'oreille de Balthazar " Sois sympa, va te mettre derrière les barrières de sécurité. De toute façon tu en sais autant que nous pour l'instant. Ce nouveau chef semble encore plus con que le précédent. " Balthazar songea que les chefs étaient décidément tous des cons, réflexion inutile, d'une affreuse banalité, indigne certes de figurer dans un texte d'une telle qualité, mais que voulez-vous les évidences ont ceci de singulier qu'elles s'imposent d'elles-même, en dépit des auteurs même.

La police recueillit les témoignages. Personne n'avait rien vu, rien entendu.

_ " Comment voulez-vous entendre quoique ce soit avec le poissonnier qui gueule sans cesse à deux pas: merluuuuuu! bar de liiiiiiigne! Riiiiiillettes de saumon, riiiiiiiillettes" précisa le maraîcher toujours prompt à balancer une vacherie sur son voisin. Vous avouerez que cela ne faisait pas avancer l'enquête.

Le soir, au commissariat, entre deux portes, Legrandu, le pote de Balthazar, un bon flic ( si, si il en existe !) donna quelques détails. Le tireur était posté sur la terrasse de l'Excelsior qui donne directement sur le marché. C'est ce que les experts de la balistique avaient estimé. Là haut : un petit mot bien sibyllin avait été laissé bien en vue :

" L'action commence aujourd'hui. J'exécute un fumier de patron au hasard. Cela ne fait que commencer." Signé : Carlota Machete."

 Ne me demande pas qui c'est Carlota Machete, je n'en sais rien, on épluche l'annuaire des Deux-Sèvres et des départements voisins. Et on attend les résultats de l'autopsie, dit encore Legrandu

Balthazar allait lui dire "mais je sais qui c'est Carlota" quand la porte s'ouvrit, le commissaire apparut et hurla

Pas de journaliste ici. On travaille, nous, monsieur. Je n'ai que faire de vous et vos semblables! Votre engeance me répugne.« La presse est une bouche forcée d’être toujours ouverte et de parler toujours. De là vient qu’elle dit mille fois plus qu’elle n’a à dire, et qu’elle divague souvent et extravague. » Alfred de Vigny. Au moins aurez-vous appris quelque chose... Dehors !

 

« Et moi j'aurais pu te dire qui est Carlota Machete si tu étais moins con », pensa Balthazar en descendant le vieil escalier de bois qui sentait un peu le vomi.

A SUIVRE

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19 septembre 2013 4 19 /09 /septembre /2013 03:48

calibres 8

 

 




 Résumé :  Michel Crapute produit des ressorts qui entrent dans la fabrication des mines antipersonnel, mais c'est ailleurs que ça  va exploser.

19 h 30 point final de l'article qui s'achevait ainsi. " Michel Crapute traite son personnel comme on ferait avec des esclaves - l'asphyxie dans des ateliers insalubres - et participe joyeusement à la production de ces armes atroces qui arrachent les jambes d'enfants dans de lointains pays ; peut-être a-t-il un cœur, c'est en tout cas dans un whisky à 1.200 € la bouteille qu'il tente de noyer son cynisme." Balthazar fila au café des arts plutôt content de lui. Devant son verre de Duhomard ( l'apéritif de Thouars) Karantec Plouendec, son ami dentiste, l'attendait déjà. Informé des premiers détails Karantec applaudit et commanda une autre tournée. De détails en détails, les tournées s'accumulèrent, jusqu'à la citation finale.

En titubant Balthazar repassa à la rédaction pour donner le dernier coup de fil aux pompiers. Le Thouarsais était calme, le journaliste pouvait aller dormir sur ses deux oreilles sérieusement échauffées. C'est alors que le téléphone sonna, sur l'écran apparut le nom du directeur départemental du" Courrier de la République" le journal qui permettait à Balthazar de payer ses longues ardoises au bistro.

"Ah, pensa-t-il, c'est le chef qui vient me féliciter!... Et il répondit de sa plus belle voix Allôôôôô qui qu'appelle à cette heure tardiiiiive ?"

_ " Qu'est que c'est que cette merde ? Tu es fou ou quoi ? Tu veux qu'on ait le préfet et la sécurité militaire sur le dos ? Ton papier sur Michel Crapute est un torchon qui ne passera jamais! De plus je te signale, espèce de fouille-merde, que Crapute est actionnaire du journal. On a autre chose à foutre que de surveiller tes articles, arrête de nous les briser avec tes théories anarchistes. Tu ne t'étonneras pas si demain, à la place de ton brûlot gauchiste, tu liras un papier fort agréable sur le concours des plus gros mangeurs de melon de Oiron !" Et le chef raccrocha sans dire "bonne nuit mon Balthazarounet" signe qu'il était colère.

Balthazar était comme assommé, par les apéros certes, mais aussi par cette furieuse estocade. Vexé, il se dit in petto " mon petit con tu ne perds rien pour attendre, je vais attendre que tu sois en repos et qu'un pote du syndicat monte les pages pour te le fourguer en douce ce papier. Et là tu pourras toujours gueuler, ce sera trop tard. Fumier!" (Note au lecteur : les engueulades dans les rédactions sont homériques, somptueuses, flamboyantes, et aussi fréquentes que les félicitations sont rares.)

 

Mais cette magnifique stratégie de contournement n'eut pas de lendemain. Le vendredi suivant, jour de marché à Thouars, Michel Crapute s'écrasait dans les courgettes et les tomates avec une balle dans la tête. Difficile de traîner dans la boue un cadavre, même celui d'un Crapute crapule.

A SUIVRE...

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18 septembre 2013 3 18 /09 /septembre /2013 03:37

 

 

calibres 7

Résumé : Balthazar est en train de devenir copain comme cochon avec le patron de RIGOMEX qui ne fait pas exception à la règle des cons, il suffit de leur chanter la chanson qu'ils aiment pour les charmer. Ah ce n'est pas un beau métier que journaliste. Et c'est si facile d'être con.

 

De retour à la rédaction Balthazar appela son vieux pote aux RG, l'ancien copain d'armée, le camarade de chambrée chez les paras d'infanterie de marine qui pissait dans le café des officiers.

_ Hé bleu bitte, dis-moi ce que fabrique la RIGOMEX.

_ Hou là p'tite bitte, c'est s'cret défense !

_ Et mes couilles, c'est l'code nucléaire ?

_ Pareil ! comme m'cul.

Évidemment le lecteur sera surpris de cet échange un poil vulgaire. Évidemment, sauf s'il ignore tout de la belle fraternité des armes et son cortège de bêtise.

 Blague à part ...

On y fabrique des p'tits  ressorts, mais pas n'importe lesquels, des p'tits ressorts en kevlar, qui ne réagissent pas aux détecteurs de métaux, ils sont forts utiles dans la fabrication des mines antipersonnel. C'est le Moyen-Age dans cette boîte, mais c'est intouchable : l' patron Michel Crapute dispose de hautes protections, notamment maçonniques. N'y fourre pas ta queue Ducon c'est l'conseil d'un vieux Marsouin (ancien de la coloniale) tu t'choperais une chtouille carabinée, autre chose que celle que t'as ramenée un jour en revenant des putes à Carcassonne.

_ Ô putain ! j'ai dérouillé, pénicilline matin, midi et soir.

Évidemment Balthazar écrivit un bel article, dans le style Gonzo, tout y était : le whisky hors d'âge et hors de prix, le cynisme de Michel Crapute, la poussière infernale derrière les établis, les contremaîtres à mâchoires de dogues et, bien sûr, l'infecte production qui participait avec bonheur à la balance nationale des exportations.

Mais il se passa quelque chose d'impensable et les boutons qui allaient pousser étaient autrement plus douloureux que ceux d'une blennorragie de cantine.

 

A SUIVRE...

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17 septembre 2013 2 17 /09 /septembre /2013 03:23

 

calibres 6

 

Résumé : pour rencontrer le patron de la RIGOMEX Michel Crapute, Balthazar a menti. Ce n'est pas beau, certes, mais "le mensonge est souvent la clef des serrures les plus complexes" proverbe suisse, canton de Vaud, à droite en entrant.

 

Michel Crapute fut très impressionné par ce journaliste un peu vil, obséquieux et visiblement hostile au prolétariat, aux syndicats et à tout ce que la gauche peut trimbaler de ringardises. Il parlait avec conviction de dérégulation, de libéralisme... Balthazar avait même mis la cravate bleu clair qu'il avait eue dans un sac avec des prospectus et des tongs le jour qu'il couvrait le congrés de L'UNPF ( Union Nationale Pour la France) parti de droite toute. 

- "Voyez-vous mon cher, je vous avais mal jugé dit le patron au journaliste,on m'avait dit sur vous d'horribles choses, reprenez de ce délicieux scotch, 26 ans d'âge : c'est le prix d'un mois de salaire dans mes ateliers."

Et de rire, et de rire. On voyait par une petite fenêtre, les ouvriers trimer dans une poussière infernale. Il n'y avait là que noirs, et des jaunes, plus quelques contremaîtres blancs avec une sale gueule de chien.

- "mais comment diable faire fortune dans le ressort ?" demanda Balthazar tout miel.

- " Il faut savoir bander!

Et de rire et de rire.

La bouteille de scotch fut vidée, une autre fut ouverte : 40 ans d'âge "deux mois de salaire" et de rire et de rire.

Rira bien qui rira le dernier.

Alors qu'allez vous écrire mon ami ? demanda Michel Crapute

Pas une ligne, c'est une affaire privée qui ne regarde personne répondit hypocritement Balthazar.

Ah! Enfin un bon journaliste. Vous m'êtes sympathique. Venez un de ces jours au bar du golf je vous ferez rencontrer d'utiles contacts.

Le golf ? Un jeu à trous du cul pensa Balthazar en filant vers son bureau.

A SUIVRE
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16 septembre 2013 1 16 /09 /septembre /2013 03:11

calibres 5

 

 

Résumé : Le mort est le patron d'une obscure boîte (Michel Crapute de la RIGOMEX) où l'on gère le personnel comme au Moyen-Age. Ce n'est pas une raison pour crever dans un cageot de tomates quand même... A moins que...

Donc, il faut ici revenir un peu en arrière. Balthazar qui n'avait jamais entendu parler de Michel Crapute, et fort peu de la RIGOMEX, apprit incidemment que le personnel de cette usine était fort mal traité. Avec une pointe de jubilation il appela donc l'entreprise installée dans une impasse au fin fond d'une zone artisanale crasseuse qui sentait l'huile chaude et le caoutchouc brûlé. Il passa sans difficulté le barrage de la secrétaire lorsqu'il dit : " j'ai sous les yeux un communiqué de l'union départementale de la CNT qui met en cause brutalement votre patron." La CNT est ce syndicat anarco-syndicaliste qui ne fait pas dans la dentelle et qui venait juste de s'installer dans le département. Balthazar n'y avait que des potes. Bien sûr il n'y avait pas de communiqué, et la CNT ne savait rien de la RIGOMEX. Pieux mensonge pour noble cause.

_ "Allô? Ici le PDG Michel Crapute, qu'est-ce que c'est cette histoire ?"

Réponse ( au lecteur de remplir les blancs) : "CNT, syndicat intraitable... Personnel malmené ... Insalubrité patente... Menace de plainte... Et patati et patata... Bien embêtant... Impossible de laisser cela sous le coude... Tracts éventuels vendredi prochain sur le marché..."

Et le coup de Jarnac final de Balthazar délicieusement faux cul : " moi j'aimerais bien ne pas en parler parce que, je ne le sais que trop, les syndicats ne veulent que la mort des entreprises, mais je ne suis pas seul à décider". Là, cet imbécile de Michel Crapute, qui ne connaissait pas le journaliste, eut le sentiment que ce merdeux de scribouillard n'était peut-être pas si mauvais, qu'on pouvait s'entendre avec ce plumitif.

_ "Venez me voir cher monsieur Balthazar Forcalquier, je vous attends".

 

C'était dans la poche. Et de la bonne info allait sortir de là. Certes elle serait obtenue de façon peu orthodoxe, mais à l'heure du jugement dernier, il y aurait bien pire à plaider ! Un beau mensonge pour une cruelle vérité c'est tout de suite pardonné.

A SUIVRE

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12 septembre 2013 4 12 /09 /septembre /2013 04:41

calibres 4

 

 

 

 

Résumé : il y a du sang dans les tomates, ce n'est pas facile, au premier coup d'oeil, de faire la différence. Dans les courgettes c'est plus aisé quand même.

 

Le corps affaissé dans les primeurs, les hurlements, et Balthazar à deux pas, qui, d'instinct se releva et vit - l'espace d'une courte éternité - l'éclair d'un reflet là-haut sur le toit de l'Excelsior le café-bal qui bordait la place et dans lequel parfois Sergio, déjà un peu chauve, mais l'oeil toujours malicieux jouait de la batterie dans un petit orchestre de jazz. 

Balthazar connaissait le type qui venait de se prendre une belle balle bien usinée et chemisée de cuivre, dans la tête. La température de la cervelle s'était soudain élevée. La victime était morte dans la stupeur.

Il était en train de marchander la salade ! Il était en train de marchander la salade répétait le maraîcher comme pour se disculper. J'y suis pour rien, il la voulait pour 30 centimes. Ce n'est pas un prix quand même. Je me suis un peu énervé c'est vrai, mais j'y suis pour rien."

"Sapristi ! se dit in petto Balthazar mais c'est...C'est Michel Crapute! "

Michel Crapute était le patron d'un boîte sans syndicat, la RIGOMEX, qui fabriquait des petits ressorts. L'activité était florissante. Michel Crapute roulait en Porsche Cheyenne et avait sa carte de membre bienfaiteur au golf. Balthazar le connaissait peu, mais il l'avait croisé voici quelques jours ; et de curieuse manière. Les conditions de travail à la RIGOMEX étaient infernales, le personnel travaillait dans une poussière atroce, sans protection, car les évacuateurs étaient toujours en panne. Un intérimaire qui n'aurait jamais dû venir là, alla se plaindre au contremaître, et fut dehors dans l'heure qui suivit. Et dans l'heure qui suivait il était devant Balthazar : "faut faire un article ! c'est le moyen-âge là-dedans!".

 

La RIGOMEX ? Balthazar avait déjà entendu ce nom au fil d'une assemblée générale de patrons, mais il n'en savait guère plus. C'est alors que les ennuis commencèrent.

 

A SUIVRE

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11 septembre 2013 3 11 /09 /septembre /2013 02:55

  calibres 3

 

 

Résumé : De Thouars on a poussé jusqu'au Mali, mais sans passer par la case "club Med".  

 

Le type qui venait de mourir, là juste devant les yeux de Mamadou et de Balthazar s'était étalé dans un cageot de courgettes. Le sang frais qui coulait de sa tempe sur les légumes d'un beau vert donnait une note printanière à l'étal un peu défraîchi du maraîcher.

Mamadou devint gris, ce qui, chez les noirs, est un signe d'extrême émotion.

- " j'veux pas d'embrouille avec les flics, mes papiers ne sont pas en règle, je jarte, le café ce sera pour un autre jour ami toubab."

Il s'esquiva avec cette grâce qu'ont les gens doués pour la danse. Il ressemblait alors à ces voleurs nocturnes qui s'enduisent d'huile pour échapper à la main de ceux qui les traquent. Mamadou était alors plus beau que d'ordinaire. Mais Balthazar n'eut pas le loisir de profiter de ce spectacle tout en souplesse.   

Des macchabées, il en avait vu des centaines et de toute sorte dans sa carrière de journaliste localier : écrabouillés menus dans leur auto au retour du bal, ou bien tordus et cramés dans la maison familiale qui n'était pas encore payée, ou encore pendus solitaires aux poutres des étables vidées (quand le troupeau de vaches folles était parti pour l'abattoir avant d'être réduit en poudre et transformé en farine pour d'autres bovins), ou alors des ouvriers maladroits qui avaient glissé de la toiture ( le patron n'ayant jamais pris la peine de payer un harnais et une corde de sécurité) et qui se trouvaient aplatis quinze mètres plus bas avec des formes bizarres dans les jambes et les bras, et des accidentés de chasse à la chevrotine qui n'avaient plus ni visage ni cervelle.

Mais là c'était différent. Un type venait de se faire flinguer devant ses yeux. Pourtant il ne fut pas autrement ému. Disons qu'il fut soudain très intrigué. C'était un bon professionnel. Il aurait de quoi écrire demain. Le mort avait une curieuse posture, un peu accroupi, un peu couché, la gueule ensanglantée dans les légumes. Dans sa chute il avait écrasé des tomates et l'on ne savait plus très bien ce qui était son sang ou ce qui était du ketchup. Pas facile d'expliquer cela au lecteur, pensa Balthazar qui comptait toujours sur la sagesse de sa secrétaire, Martine, pour freiner ses écarts, et faire en sorte que le détail soit vrai sans être trop... véridique. "Du sang oui, mais point trop n'en faut " était la prudente formule de cette perle qui savait toujours tenir au frais une bouteille de blanc.

Après un instant de silence absolu, des filles, alentour se mirent à hurler, et l'atmosphère monta brutalement dans les aigus. C'était grave!

Balthazar se pencha sur la victime. Il connaissait ce type.

 

      A SUIVRE

 

 

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